Jacky Chéry, Pasteur et poète, a répondu à B-atitid sur les violences conjugales, l’un des fléaux qui gangrènent les familles protestantes en Haïti.
Pasteur associé à l’Eglise Baptiste Evangélique de Pétion-Ville (Delmas 93) et à l’Eglise Baptiste Evangélique Haïtienne de Canapé-Vert, Jacky Chéry est l’un des personnages emblématiques du milieu protestant en Haïti.
Il est responsable de Perspectives Réformées Haïti qui produit des programmes évangéliques pour la radio diffusion, conduit un ministère de soin pastoral et également un cours biblique par correspondance.
Il est aussi responsable de PALEH-Ministè Dèyè Mòn, une institution qui organise des formations pour les leaders évangéliques qui n’ont jamais eu accès à une école biblique. PALEH mène également la campagne KAREMAN qui vise à influencer la mentalité de la personne haïtienne.
Avez-vous déjà entendu parler, voire, traiter un cas de violences conjugales pendant votre leadership pastoral ? Si oui, quels ont été les conséquences et résultats de cette expérience ?
Jacky Chéry : Les cas de violences conjugales sont dommage assez fréquents dans les églises. On n’en en parle pas souvent, mais les victimes subissent les forfaits le plus souvent dans l’anonymat et en silence.
C’est même un fléau dans les églises. Alors, oui j’en ai entendu parler. Oui, je suis déjà mené à intervenir dans certains cas.
Les conséquences et résultats de ces expériences font que les blessures des violences conjugales restent profondes et mêmes traumatisantes dans les foyers. Il s’agit d’une perte de dignité, d’estime de soi, de blessures physiques et émotionnelles.
Les résultats, du côté de la victime, amènent une certaine méfiance ; et pour certains forfaitaires, une sorte de gêne. Mais, pas toujours car ils sont souvent récidivistes.
Quel est votre position concernant les violences faites aux femmes dans les foyers chrétiennes ?
Jacky Chéry : Que la violence soit faite aux femmes ou aux hommes, elle est inadmissible. Il n’y a pas de justificatif pour des actes de violences. Ma position personnelle, c’est que c’est inadmissible et intolérable.
Quel que soit la raison qui pourrait être à la base, le dialogue est le premier chemin à emprunter. Donner des coups est excessif, et cela témoigne d’un manque de maitrise des émotions, particulièrement chez un chrétien qui a en lui la présence du Saint-Esprit.
En ce qui a trait à la violence faites aux femmes chrétiennes, je crois que c’est intolérable. Et j’encourage les femmes à le dire. Il ne faut pas avoir peur de dénoncer le mal.
Selon vous, les versets préconisant l’autorité de l’homme sur la femme sont-ils les causes de ces pratiques ?
Jacky Chéry : Pas tout à fait. Le mal est en chacun de nous, et c’est à nous de le surmonter. Comme Dieu avait dit à Caïn : « Le péché est à ta porte, mais toi, domine sur lui. »
Je ne crois qu’il y a un verset de la Bible à préconiser une autorité démesurée d’un conjoint sur un autre. Il y a certes des mauvaises interprétations de certains passages bibliques. Comme par exemple : « L’homme est le chef de la femme… »
Il y a en réalité certaines personnes qui utilisent les versets de la Bible en leur faveur pour dominer sur d’autres personnes. Mais, la Bible est un livre équilibré et cohérent.
L’autorité de l’homme par rapport à la femme dans la Bible est une affaire de responsabilité, et cela est d’une conséquence si grande qu’il stipule que l’homme se doit d’aimer sa femme comme Jésus-Christ à aimer l’Eglise.
Comment Jésus à aimer l’Eglise ? Il s’est sacrifié pour elle. Voilà la responsabilité de l’homme envers sa femme. Amour, sacrifice, protection, provision, support, etc.
Est-ce que ces pratiques ne sont pas également la conséquence de certaines idées misogynes transmises dans des prédications par certains leaders?
Jacky Chéry : Si quelqu’un aurait à utiliser un passage biblique pour propulser la misogynie, c’est que cette personne n’aura pas comprise l’enseignement de la Bible. Chaque passage doit être abordé dans son contexte et appliqué suivant la vérité universelle de toute la Bible.
À aucun moment donné la Bible n’enseigne la misogynie. C’est pourquoi il est important que les gens cherchent à écouter les enseignants évangéliques au lieu des propagandistes, ni les « voye monte. »
Il faut savoir analyser chaque enseignement donné par une personne quelconque et confronter cet enseignement avec la « logique » de Dieu. Il y a tellement de déformations faites par les courants de pensées et mêmes les religions.
Croyez-vous que les églises évangéliques accordent assez d’importance contre ces pratiques ? Comment devraient-ils se positionner contre elles, selon vous ?
Jacky Chéry : Je crois que désormais certaines églises font des efforts pour pallier à ce problème de violences conjugales parmi les chrétiens. Il reste que l’on soit encore trop lent à se prononcer sur les faits, ni à les exposer.
Toutefois, il faut aussi considérer que les personnes qui se retrouvent souvent dans ces situations veulent encore sauvegarder un certain témoignage à l’église et par devant la société. C’est pourquoi nous voulons encourager les victimes à ne pas garder silence, mais à crier aux détresses et à chercher de l’aide.
Les églises évangéliques doivent toujours accorder priorité aux problèmes qui rongent les familles, particulièrement les violences conjugales. En plus des pasteurs qui font les séances de counseling, je crois que les professionnels comme les psychologues et les travailleurs sociaux peuvent être d’une grande aide à leurs congrégations respectives.
Quels conseils donnez-vous à une chrétienne victime de violence conjugale ?
Jacky Chéry : Mon premier conseil pour une chrétienne victime de violence conjugale, c’est de chercher à ce que cela ne se répète plus. Comment ? Il faut le dire.
Vous pouvez lire également : Les violences contre les femmes, de véritables «fléaux» dans les églises protestantes
Il y a plein de gens capable d’aider dans ces circonstances. Alors que l’on veut bien préserver sa famille et son intimité, il faut préserver aussi et d’abord sa vie. Il ne faut pas accepter l’inacceptable.
Dieu n’a jamais ordonné qu’un homme puisse frapper ou battre une femme. Vice versa. Alors, toutes les victimes de violences conjugales doivent savoir que ce n’est pas possible d’accepter cela dans un foyer.
Il faut aussi faire attention et la prévention dès le premier signe de menace. Nous sommes appelés à aimer, non pas à frapper ni à se battre entre nous. Aux forfaitaires, comment pouvez-vous dire aimer votre conjoint à partir de coups que vous lui administré ? Il n’y a aucune, aucune, aucune bonne raison pour frapper son conjoint.
Entrevue réalisée par Hadson Archange Albert
Leave A Reply