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Les « assassinats » attribués à Dieu dans la Bible sont-ils justifiables ?

23 mars 2021

S’il est un sujet de la théologie biblique qui m’a le plus tourmenté depuis mon adolescence d’« enfant de la promesse », c’est bien celui-ci. Il est évident que cette question a donné et continue de donner des sueurs froides aux Juifs et aux chrétiens ainsi qu’aux théologiens et apologètes de ces religions du monde entier, tant elle met en doute la nature privilégiée du Dieu de la Bible présenté comme l’incarnation de l’amour et de la bonté.

Ce n’est pas sans raison que l’argument du « Dieu assassin » a toujours été, depuis des lustres, privilégié par les détracteurs de la foi juive et chrétienne, particulièrement les athées qui y trouvent une raison des plus valables de rejeter et de pourfendre l’immoralité et la bêtise de ces « religions antiques ».

Cependant, depuis le début de cette année, je suis étonné du succès de cette thèse sur les réseaux sociaux. La raison : un article. En effet, plusieurs de mes contacts sur Facebook et sur WhatsApp, athées, agnostiques ou non-chrétiens, se font un plaisir immense – je les comprends – de partager et de commenter avec ironie et raillerie cet article paru depuis assez longtemps, le 25 avril 2016, sur Slate.fr, titré d’un ton sentencieux : « Dieu a tué 2,8 millions de personnes dans la Bible. »

Le texte rapporte les belles pages d’un ouvrage – que je n’ai pas encore lu – de l’écrivain Steve Wells[2], « Drunk With Blood: God’s Killings In The Bible » (en français, «Ivre de sang: les meurtres de Dieu dans la Bible») dans lequel il dénombre tous les « meurtres et exécutions » rapportés dans la Bible comme commis directement ou commandités par Dieu. Le décompte de ces « assassinats » s’élève, selon l’auteur, à 25 millions de morts, alors que le site Vocativ.com s’inspirant du même ouvrage recense « un total de 2 821 364 décès spécifiquement énumérés dans les Écritures comme étant soit directement orchestrés par Dieu, soit exécutés avec son aide ou son approbation. »[3]

De mon lieu de croyant et défenseur de la foi chrétienne (sans diplôme de théologie, faut-il le préciser), l’intérêt pour cet article m’a beaucoup interpellé et m’a vraiment donné le fardeau d’écrire un texte responsif à ce papier et surtout à l’argument du « Dieu assassin » assez habilement défendu par Steve Wells.

Précisions liminaires : premièrement, je vais vous éviter, dans la mesure du possible, le raisonnement-échappatoire consistant à dire que « les voies du Seigneur sont impénétrables »[4]. Deuxièmement, j’utiliserai toujours des guillemets en employant les termes « assassinats », « meurtres » et leurs synonymes puisque cela me permettra de démarrer l’argumentation sans apriori moral et sans une qualification juridique des faits contrairement aux auteurs des ouvrage et articles évoqués plus haut. Troisièmement, je dois signaler pour le moins la légèreté de l’évaluation du nombre de morts opérée par Wells. Car, les récits bibliques – ce sont bien eux la principale source des faits évoqués – ne permettent nullement d’en arriver à une telle estimation, que ce soit le déluge dans Genèse 7, la destruction de la Tour de Babel dans Genèse 11 ou encore l’engloutissement des égyptiens sous la mer rouge dans Exode 14. D’où viennent alors ces 25 millions de décès évoqués par l’auteur ? Cette invention de l’essayiste ne renseigne-t-elle pas sur sa rigueur académique ou plus simplement son honnêteté intellectuelle ? A vous d’en juger !

Quatrième précision de départ : notez que cette thématique de la sentence fatale de Dieu ne concerne pas uniquement l’Ancien Testament. Le Nouveau Testament, quoique de loin moins sanglant, rapporte notamment l’histoire d’Ananias et Saphira, tués subitement sous la colère divine. Il y a également le récit apocalyptique de l’enfer qui certes ne réfère pas à une mort naturelle mais éternelle qui pourrait être, selon certains, plus atroce. D’où une autre raison de faire la lumière sur le sujet. Dernière précision : je porte à votre attention le fait que les rédacteurs de la Bible n’ont pas eu honte de mentionner les épisodes très durs de l’exercice du jugement de Dieu. Ils n’en ont pas fait abstraction par désir de peindre un Dieu seulement aimant, doux et dénué de toute colère. Ce qui me fait penser qu’ils ont eu des raisons de le faire ainsi. Ce sont ces possibles justifications que je m’attèlerai à chercher dans cet article – qui n’a pas la prétention d’être un travail rigoureux d’herméneutique biblique[5], en évoquant et évaluant diverses explications émises par des théologiens et certaines que je propose personnellement. Ma grille d’analyse est celle de la philosophie morale et de sociologie juridique contemporaine.

  1. La thèse présentant les faits comme des récits allégoriques

Pour expliquer l’ambiguïté morale des passages bibliques présentant Dieu comme un maitre vengeur qui fait couler le sang à flot, certains théologiens, appelés les « allégoristes chrétiens », avancent que ces extraits des Ecritures relatent des faits qui ne se sont pas vraiment passés et les attribuent à des allégories, c’est-à-dire, des narrations consistant à représenter une idée abstraite, une notion morale par une image ou un récit. Selon l’Encyclopædia Universalis, « l’allégorie a […] une fonction apologétique : elle rend acceptables certains textes difficiles ou d’apparence scandaleuse. L’absurdité ou l’inconvenance d’un passage constituent aux yeux des allégoristes un indice incontestable de la nécessité de dépasser le sens immédiatement apparent. » Dans le cas de ces récits, la signification souvent avancée des dites allégories renvoie à la nécessité de craindre Dieu et de respecter ses préceptes, puisque le moindre de nos actes n’est pas sans conséquences.

Quelle est, selon moi, la valeur de cet argument ? A première vue, c’est un raisonnement qui peut être taxé de facile par les uns et de blasphématoire par les autres. En effet, d’un côté, les pourfendeurs de la morale chrétienne diront qu’il s’agit là d’un faux-fuyant, un tour de passe-passe pour ne pas assumer l’indécence de cette dernière. D’un autre côté, des Juifs et des chrétiens qualifiés de « littéralistes » estimeront que c’est un argument qui, par manque de courage et clairvoyance spirituelle et excès de scepticisme, remettent en cause la vérité des récits bibliques et commettent le péché de blasphème. Cette position est souvent celle des évangéliques.

Mon avis là-dessus est que ce n’est pas un argument qu’on peut rejeter d’un revers de main puisque de plus en plus de croyants, même parmi les fondamentalistes, commencent à accepter que des faits bibliques présentés comme réels dans la Bible (comme la Création telle que résumée, le Déluge, la création et la destruction de la Tour de Babel) peuvent bien être des récits métaphoriques comme les paraboles de Jésus. Devant les avancées scientifiques et la précision des outils de vérification en paléontologie et en géologie, cette approche a tout son sens, car, comme le pensent des scientifiques chrétiens, la Bible n’est pas un livre de science mais plutôt de morale.

Cependant, le danger de cette démarche est la propension à présenter tous les récits bibliques comme des allégories et de mettre de l’eau au moulin de ceux qui avancent que Jésus de Nazareth n’a jamais vécu sur terre, alors que l’historicité du Christ est admise par un grand nombre d’érudits croyants et non-croyants sur la base de sources non chrétiennes juives, grecques et latines. A mon avis, la meilleure attitude à avoir concernant la véracité des récits bibliques est une vérification au cas par cas, autant que possible mais non un rejet total et catégorique ou une acceptation totale et complète.

  • L’argument du Dieu fait bouc-émissaire

Il s’agit là de l’argument que le jeune étudiant fougueux et sceptique que je fus dans ma vingtaine a privilégié ou apprécié. Il s’agit de dire que les rédacteurs de la Bible ont mis sur le compte de Dieu des crimes et des faits d’armes du peuple juif de manière à mieux assoir le caractère sacré des mythes fondateurs de cette communauté humaine vivant dans un espace géopolitique hostile dans le Proche-Orient. Cette thèse (qui ne concerne que les exécutions commises par les juifs) compare les récits bibliques aux explications providentielles avancées par certains rabbins contemporains pour justifier les attaques à la bombe et autres exactions perpétrées, depuis le siècle dernier, par le Mossad et l’armée de défense d’Israël contre la population civile palestinienne. Tout comme ces faits récents sont graves et difficilement défendables, certaines conquêtes des forces armées juives racontées dans la Bible sont si maculées de sang (des nourrissons, des enfants, etc.) qu’on peut à juste titre penser que les auteurs de ces atrocités, pour se dédouaner, font porter le chapeau à Dieu. « Ce n’est pas ma faute, c’est Jéhovah qui m’en a donné l’ordre ».

S’il est vrai qu’il donne une explication politique et temporelle très intéressante du bienfondé des récits en question, cet argument pose quelques problèmes. Tout d’abord, les épisodes sanglants d’Israël ne sont pas remis en question ou rejeté par le nouveau Testament et Jésus-Christ, en particulier, apôtre par excellence de la non-violence, même dans son fameux discours sur la montagne dans lequel il abroge la loi du talion. D’ailleurs, Il est lui-même héritier de David, le roi d’Israël qui, dans la Bible, a sans doute conduit le plus grand nombre de batailles meurtrières dans la Bible. C’est ce même David que l’apôtre Paul a rappelé, dans Actes 13:22, qu’il était « un homme selon le cœur de Dieu », malgré tout le sang qu’il a fait couler. Il est clair donc que même les plus pacifistes de la Bible admettent que les tueries commises par les Israéliens dans l’Ancien Testament étaient dictées directement par Dieu ou, en tout cas, ils ne disent pas le contraire.

Le second problème posé par l’argument présentant Dieu comme le bouc-émissaire des rédacteurs cruels de la Bible est qu’il ne tient pas compte de la nature complète du Dieu biblique. Car, au-delà des récits et des illustrations factuelles, la doctrine juive et chrétienne présente Jéhovah comme à la fois un Dieu d’amour et « un feu dévorant », un « Dieu jaloux », « l’Eternel des armées » (Hébreux 12:29, Exode 15:7, Deutéronome 4:24, Deutéronome 9:3, etc.). L’auteur de l’épitre aux Hébreux (pendant la dispensation de la grâce) ira même jusqu’à dire : « c’est une chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant » (Hébreux 10:31). Ainsi, il est évident pour moi que cette thèse du Dieu fait bouc-émissaire est difficilement défendable dans sa généralité par un chrétien pour expliquer les passages bibliques à l’étude.

Cependant, cette position est tout à fait tenable pour les déistes, les croyants en un Dieu non-interventionniste ou même des croyants d’autres religions qui peuvent ainsi critiquer le fait que les juifs, se croyant le peuple élu, veulent faire de Dieu le justificateur de tous leurs crimes. Néanmoins, certains chrétiens peuvent également dire que ce n’est pas parce que la Bible dit que Dieu est un feu dévorant que toutes les exécutions qu’on lui attribue dans la Bible, sont bien de lui. Cette approche est intéressante mais part du principe, pour ces chrétiens, que certains récits bibliques ne sont pas uniquement allégoriques mais catégoriquement faux et diffamatoires à l’égard du Dieu de cette même Bible. Cette position mène à un casse-tête théologique consistant à chercher un à un les fois où Dieu a réellement parlé et quand on lui attribue des propos qui ne sont pas réellement de lui. Cette approche me tente pour son côté iconoclaste et son appréciation politique et anthropologique du discours du peuple juif sur la violence mais me parait insuffisante à expliquer les interventions divines vengeresses sans la main humaine.

  • Tués par un principe : le salaire du péché c’est la mort

Il s’agit là d’un argument privilégié par des théologiens légalistes consistant à dire que les personnes tuées dans la Bible suite à des verdicts divins ont été en réalité condamnées en vertu d’un principe préétabli par Dieu dès la chute dans le jardin d’Eden et résumé par l’apôtre Paul dans Romains 6:23. Pour les tenants de cette position, de même qu’Il a créé les lois de la nature telles que la pesanteur et ne permet à personne de les violer, Dieu tient aussi fermement à l’application de ses lois spirituelles, selon qu’il est écrit, dans Jérémie 1 :12 : « je veille sur ma parole pour l’exécuter ». L’intérêt ici est de montrer que les personnes tombées sous le jugement de Dieu ont tous mérité leur châtiment, à l’instar des criminels condamnés par la justice terrestre. Ce qui me plait dans cet argument c’est qu’il veut montrer que les sentences divines sont impartiales puisque « Dieu ne fait acception de personne » (Romains 2:11, Colossiens 3:25, Deutéronome 10:17).

Cet argument est, à mon avis, essentiel parce qu’Il rejette l’idée d’un Dieu capricieux. Il introduit l’idée d’une base légale préétablie derrière les sentences divines. Ainsi, il permet de justifier certains récits bibliques embarrassants : la mort à cause du non-respect du principe de sacralité des personnes et des choses ointes par Dieu (les enfants moqueurs dans 2 Rois 2, Ananias et Saphira dans Actes 4 et 5, Uzza qui toucha l’arche de l’Eternel (2 Samuel 6), etc.) ainsi que la mort éternelle en enfer à cause du refus de se repentir de ses péchés (Apocalypse 22:15 et 1 Corinthiens 6:9,10).

Cependant, le problème de cet argument c’est qu’il fait fi de tous les cas exceptionnels où Dieu a, de son plein gré, exprimé une appréciation pour quelqu’un et une détestation pour quelqu’un d’autre. « J’ai aimé Jacob Et j’ai haï Esaü » (Romains 9 :13, Malachie 1:2-3). D’ailleurs, le choix même d’Israël comme peuple élu parait tributaire de ce que la théologie judéo-chrétienne appelle la souveraineté de Dieu (Exode 19:5-6, Deutéronome 14:2), nonobstant la droiture des patriarches Abraham, Isaac et Jacob. Ainsi donc, l’on pourrait se demander, pourquoi Dieu n’a pas détruit tous les peuples du monde, à l’exception de celui qu’Il a élu ? Et puisque les hommes ont continué à pécher après le déluge, pourquoi Il n’a pas provoqué d’autres déluges ? Ne peut-on pas dire que les hommes du temps de Noé ou ceux de Sodome et Gomorrhe ont été plus durement puni par Dieu ? Ce sont des questions que l’argument légaliste ici présenté ne peut pas à lui seul répondre. Du moins, il faudrait savoir réellement sur la base de quel principe Dieu a infligé ses châtiments fatals. Ce qui me renvoie au dernier argument qui est celui que je préfère, puisqu’assez original.

  • Limiter la propagation du virus du péché

Cet argument consiste à dire que Dieu, dans sa justice suprême et souveraine, a des explications valables pour justifier le fait d’avoir tué ou fait tuer des millions de personnes dans la Bible. Ces explications sont certes cachées, mais, d’une part, il peut les révéler à qui Il veut dans chaque cas et, d’autre part, elles reposent sur la nécessité (très évocatrice en ces temps de Covid-19) de la limitation de la propagation du virus du péché et de ses conséquences. Dans Jean 9:3 et Jean 11:3, Jésus établit le principe selon lequel tous les évènements fâcheux survenus sur terre qui ne soient pas le fait direct ou indirect de l’homme dans ses errements ou réalisés sous l’influence du diable et de ses anges, sont en réalité accomplis pour la manifestation de la gloire de Dieu, soit à travers un futur renversement de situation sous l’effet d’un miracle soit par l’apprentissage d’une leçon à travers cette situation malencontreuse.

Ce principe évoquant l’expression de la gloire de Dieu à travers les catastrophes et les problèmes divers peut aussi valoir pour expliquer l’exécution de la peine capitale par Dieu. Il s’agit ici d’envisager le fait selon lequel Dieu a fait mourir certaines personnes ou groupes de personnes dans l’ancien testament pour manifester sa gloire : soit pour accélérer la réalisation de son plan (les premiers nés d’Egypte), soit pour enlever un obstacle à l’exécution du plan divin futur (puisque Dieu ne peut les contraindre à changer à cause de leur libre-arbitre et que la possibilité du salut de leur âme en Jésus-Christ n’était pas encore disponible). Dans 1 Samuel 15:3, Dieu donne un ordre à Saül qui peut paraitre totalement abominable : « va maintenant, frappe Amalek, et dévouez par interdit tout ce qui lui appartient; tu ne l’épargneras point, et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et brebis, chameaux et ânes ». Ce texte est à première vue très choquant mais en voici deux explications plausibles : d’une part, il s’agit d’un jugement divin basé sur le principe du « œil pour œil, dent pour dent » puisqu’au verset 33, Samuel précise que les Amalécites avaient pour coutume même de tuer des enfants et des nourrissons.

D’autre part, Dieu n’a pas donné cet ordre à Israël par simple désir de réciprocité mais surtout Il a voulu annuler un principe spirituel mis en œuvre par ce peuple païen sous l’influence du diable et de ses anges. Puisque le rite magique du sacrifice de bébés qui constitue l’un des plus hauts niveaux de sorcellerie, Il a voulu ainsi couper court à la propagation du virus démoniaque inoculé à cette population et à tous ses avoirs. Il est donc très probable que des démons très puissants aient été interpellés par ces hommes et femmes grâce à ce procédé occulte et qu’ils les aient possédés, eux ainsi que leurs enfants et nourrissons aussi bien que leur bétail (la Bible montre que les animaux peuvent aussi être sous influence démoniaque). Le miracle de l’exorcisme n’étant possible que jusque dans le Nouveau Testament, Dieu a prévu toutes les catastrophes que pourrait causer au devenir de l’humanité la multiplication de ces personnes infectées de démons et surtout la mise en échec de son plan de salut par la contamination des enfants d’Israël à travers notamment le sexe et la consommation de viandes sacrifiées aux idoles (deux portes d’entrée privilégiées des esprits mauvais, les occultistes peuvent en témoigner). C’est ainsi qu’Il a enjoint les enfants d’Israël de stopper cette infestation démoniaque pour qu’elle n’atteigne pas plus de personnes. Aussi, les tenants de cette argumentation peuvent habilement demander aux détracteurs : comment le monde serait-il aujourd’hui si Dieu n’avait pas limité l’expansion du péché viral en enlevant des oranges pourris du panier pendant le déluge, à Sodome et Gomorrhe et dans d’autres récits bibliques ? Est-ce qu’il n’y aurait pas plus de violences, plus de morts, plus de méchancetés, plus d’injustices ? N’est-ce pas que Dieu a exterminé des millions de vies pour en sauver des milliards ?

Du point de la philosophie morale, on pourrait dire que Dieu n’opte pas pour l’« impératif catégorique » cher à Emmanuel Kant qui aurait estimé que la vie d’un seul Amalécite vaut celle des milliards de personnes sauvées au travers du peuple d’Israël et de sa descendance incarnée en Jésus-Christ. Jéhovah penche plutôt du côté des défenseurs de l’« impératif hypothétique » comme Aristote, les philosophes stoïciens et Hegel, en ce sens qu’Il pose une action jugée nécessaire pour atteindre une fin possible. Devant le dilemme moral opposant le pourrissement de la nature humaine à son attachement pour sa créature ultime qu’il a fait « de peu inférieur » à lui (Psaumes 8:5), Dieu, dans sa sagesse et son amour, a fait le choix difficile mais stoïque de sauver le reste de sa création en sacrifiant – c’est ce que font les Etats pour exercer, selon Wéber, le monopole de la violence légitime – quelques millions de ceux faisant partie de l’espèce qui constitue son plus grand chef d’œuvre mais ayant été totalement corrompus, tel un fichier informatique, par ce logiciel malveillant qu’est le péché. Et, au bout du compte, comme sacrifice ultime et pour allier éthique de responsabilité et éthique de conviction, Il a offert son fils unique, le seul être humain sans aucun péché en lui et, de ce fait, le parfait anti-virus – forçons l’analogie informatique – capable de nettoyer en profondeur les fichiers endommagés que nous sommes tous et toutes.

Conclusion

Je viens d’exposer les forces et les faiblesses de quatre (4) thèses avancées pour expliquer le fait selon lequel le Dieu de la Bible a tué ou fait tuer des millions de personnes dans l’ancien Testament. Ma position personnelle est une synthèse des points forts de ces arguments avec une préférence pour le denier qui tient à la fois compte de la préscience, de l’amour, de la souveraineté et de la colère de Dieu. En une phrase, je résumerais mon point de vue en ces termes : dans son amour pour l’humanité (Argument 4), Dieu, dans l’ancien Testament, est présenté (A. 1 et 2) comme le juge qui a rétribué à des millions de pécheurs et à leurs descendances, le salaire de leurs iniquités (A. 3) en les faisant  mourir de manière à pouvoir sauver des milliards d’autres par la suite par une limitation de la propagation de certains péchés et grâce à l’alliance faite avec son peuple Israël et surtout à son plan de salut mis en œuvre en la personne de Jésus-Christ (A. 4).

Oui, je sais que toute cette argumentation soulève plusieurs questions théologiques et philosophiques épineuses. Permettez-moi de répondre à quelques-unes ici en vrac et sans trop entrer en profondeur. Pourquoi le Dieu Tout-puissant n’a pas complètement guéri toutes les oranges pourris sans distinction ? Réponse : le libre-arbitre. Il ne pouvait pas les forcer à accepter cette guérison spirituelle. Qu’en est-il des enfants tués et qui ne pouvaient pas encore exprimer leur libre-arbitre ? Réponse : ils ont été victimes de la malédiction générationnelle puisqu’étant, dès leur plus jeune âge, des hôtes des démons ? Pourquoi Dieu n’a pas exterminé tous les peuples pécheurs et laissé seul sur terre le peuple élu ? Réponse : c’est une décision souveraine mais je répondrais que tous les peuples ne sont pas au même niveau de décrépitude morale dû à la transgression de la loi divine pourtant « écrite dans les cœurs » de tous, de toutes générations et dans tous les continents (Romains 2:15). Cette question effleure également celle du devenir éternel des peuples non élus et des humains qui n’ont pas écouté et/ou accepté le message salvateur du Christ. Une réponse concise mais polémique : Dieu « rendra à chacun selon ce qu’est son œuvre » (Apocalypse 22:12). Ce qui impliquerait que le châtiment éternel ne s’exercera pas uniquement en raison du rejet du salut par la grâce en Jésus mais aussi en fonction des actions commises sur terre.

Dernière question difficile : pourquoi Jésus n’est pas venu juste après le péché originel d’Adam et d’Eve pour empêcher que toutes ces personnes soient exterminées par la colère de Dieu dans l’ancienne alliance ? Pourquoi fallait-il attendre toutes ces années pour la venue de Christ ? Je n’ai pas de réponse précise à cette question. Je dirais cependant que, même après avoir attendu tout ce temps avant de faire venir son fils sur terre, Dieu n’a pas pu et ne peut toujours pas convaincre des milliards d’humains à suivre le message d’amour du Christ et à quitter leurs péchés de violence, de perversions morales et d’injustice. Les récits de l’ancien Testament devraient nous montrer à tous le traitement que l’on devrait mériter à cause de nos égarements et dont nous sommes épargnés grâce au sacrifice expiatoire de Jésus. Mais, ce message n’a malheureusement pas interpellés bon nombre d’hommes et de femmes qui, depuis le premier siècle, n’en font aucun cas.

Je finirai en disant qu’il est difficile de nier le fait que Jésus-Christ soit le plus grand prédicateur et modèle de non-violence et de paix dans toutes les religions du monde et dans l’histoire même de l’humanité. Après avoir prêché le don de soi et l’acceptation des souffrances et des persécutions de toutes sortes pour la défense de la justice, il est passé de la parole aux actes en s’offrant en holocauste sa propre vie innocente pour le salut de tous et de toutes, parmi lesquels les plus grands criminels et ceux-là même qui l’ont crucifié, si seulement ils se repentent. Quelle plus grande preuve de rejet total de la violence ? Cette supériorité morale du Christianisme est l’une des raisons pour lesquelles je suis et je reste chrétien.

Hans-Berry Jacques

Professionnel en Communication et juriste

Chrétien et citoyen haïtien


[1] Malgré mes recherches sur Internet, j’ai malheureusement peu de détails sur l’auteur (surtout sa nationalité et son background académique). Cependant, sur Amazon, il se présente ainsi : « Steve Wells is the author of the “Skeptic’s Annotated Bible” and “Drunk with Blood: God’s killings in the Bible”. He also created and maintains the website www.skepticsannotatedbible.com and www.dwindlinginunbelief.blogspot.com. When he’s not critiquing the “holy books”, he can usually be found with a field guide identifying insects / plants / birds, sailing, or auditing classes at the local university”.

[2] Le verset original qui rapporte cette locution (Psaume 139:17) dit plutôt que les pensées de Dieu « semblent » impénétrables. Une lecture croisée de la Bible permet de dire que les mystères de Dieu sont plutôt « cachés » et Il les révèle à qui il veut (Deutéronome 29 :29, Daniel 2 :22).

[3] Comme dit plus haut, je n’en ai pas nécessairement la qualification académique et je me manque de documentations appropriées. Mon travail est donc réalisé particulièrement sur la base de quelques lectures faites sur Internet et de mon appréciation personnelle de juriste.

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